Le texte instituant une taxe au mètre sur les bateaux, et voté par les députés, a soulevé une mobilisation sans précédent du monde maritime. Dans le Var, deux aires marines protégées sont concernées.

Quand il a déposé son amendement le 13 février dernier, Paul Giacobbi, député PRG de Haute-Corse, et président du Conseil exécutif de Corse ne s'attendait sûrement pas à déclencher un tel raz de marée.

Pourtant, quelques jours après l'adoption du texte, le 3 mars à l'Assemblée nationale, par 48 voix, contre 27, neuf fédérations majeures du monde maritime français (1) lançaient un « Appel pour que la mer reste libre »(2) déjà signé par 13 000 personnes.

Et de nombreuses autres pétitions circulent, à l'initiative des chambres de commerce et d'industrie, du Medef, etc.

17 sites concernés en France, dont 2 varois

Cette mesure, très controversée, instaure le droit de faire payer une redevance de mouillage - a priori en saison - aux bateaux qui jettent l'ancre dans une aire marine protégée.

D'où le vent de panique généré, puisque actuellement les aires marines protégées représentent 23,63 % des eaux françaises métropolitaines, et environ 81,6% en Paca. Mais attention ! En fait, seules sont concernées les aires marines protégées « gérées par des collectivités territoriales ou leurs établissements publics ».

Soit, actuellement, 17 sites en France : trois en Corse, neuf hors de notre région, et deux sites en Paca, qui se situent... dans le Var (voir par ailleurs).« Ces sites sont effectivement susceptibles d'instaurer une redevance, mais seulement s'ils le souhaitent, et si l'amendement passe dans les mêmes termes au Sénat », relativise l'Agence des aires maritimes protégée (Brest).

Le montant n'est pas fixé

Seulement voilà, les opposants - notamment les signataires de l'Appel pour que la mer reste libre - ne croient pas à cette restriction.

Pour eux « cet impôt qui instaure un droit d'accès à la mer, ne vise pas à préserver l'environnement, puisque l'on n'empêche, ni ne limite, le nombre de mouillages et aucun service n'est apporté en contrepartie aux plaisanciers. Il a pour finalité de créer des recettes fiscales destinées à financer l'agence des aires marines protégées dont le réseau va s'étendre d'ici 2020. Et pour ce faire, le dispositif devra être généralisé à l'ensemble de ces espaces marins.»

Autre motif de la levée de bouclier : le montant de la taxe annoncé à 20 euros par mètre, ce qui équivaut, pour un bateau de 8 mètres à 160 euros par jour !

Affolement chez les plaisanciers, pêcheurs, plongeurs, etc. qui considèrent cette taxe comme « une discrimination par l'argent et une atteinte fondamentale à la liberté ». Fureur, enfin, des organisations professionnelles du monde maritime qui dénoncent une mesure « dont les conséquences seront dramatiques pour la filière nautique française et pour l'ensemble des économies littorales ».

Précision: le montant de la redevance sera fixé par décret.

Un problème corse

A l'origine de ce texte, la volonté, depuis 2009, de la collectivité territoriale de Corse de solutionner le problème de surfréquentation, en saison, de la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio par des yachts de grande taille.

L'assemblée de Corse a donc voté à l'unanimité l'instauration d'une redevance de mouillage sur ce site. Sauf que la loi ne lui permet pas.

Le gouvernement a donc introduit cette possibilité par un amendement présenté le 20 janvier au Sénat dans le cadre de la loi NOTre (nouvelle organisation territoriale de la République). Mesure rejetée par la commission des lois.

Paul Giacobbi a donc déposé un nouvel amendement, avec le soutien du gouvernement, pour réintroduire le principe de la redevance... et il a obtenu gain de cause le 3 mars.

Très agacé par la vague de contestation nationale (voir interview ci-contre) Paul Giacobbi, ne cache pas qu'il avait pour seul objectif de gérer un problème corse.

De l'avis de plusieurs interlocuteurs, le gouvernement a semble-t-il voulu l'aider dans cette visée, en débloquant un levier constitutionnel.

Sauf qu'apparemment, soit, il n'a pas bien pris la mesure de ce qu'impliquait ce déblocage , soit la visée était précise, et le tollé justifié.

Parmi les nombreux parlementaires à avoir réagi, Hubert Falco, le sénateur-maire de Toulon vient de déposer une question écrite auprès de la ministre de la Décentralisation et de la Fonction publique.

L'élu varois lui demande d'apporter des éclaircissements, compte tenu de « l'imprécision du texte[qui]suscite de nombreuses inquiétudes.» Des réponses très attendues et qui viendront compléter celles apportées, ici, par Paul Giacobbi.


1. Fédération des industries nautiques, fédération française de voile, fédération française d'études et de sports sous-marins, fédération française de ports de plaisance, fédération nationale des pêcheurs plaisanciers et sportifs de Frances, Union nationale des associations de navigateurs Méditerranée, Fédération chasse sous-marine passion, fédération française motonautique, fédération française des pêcheurs en mer.

2. Voir texte complet sur merlibre.fr


Source: varmatin.com